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Journal de bord du Saint-Laurent

L'avion quitte enfin l'atlantique et débute sa lente descente au dessus du Québec. Cela fait huit heures que nous attendons, et voilà au loin ce qui nous semble un mince filet d'eau qui grossit au fur et à mesure de notre approche de Montréal : Le Saint-Laurent, fleuve mythique qu'empruntèrent les premiers découvreurs du continent nord-américain. Loin de se comparer à des Jacques Cartier et autre Champlain nous éprouvons un sentiment emprunt d'inquiétude et d'excitations d'explorateurs. Pourtant cela fait quelques années que de nombreux anglais pratiquent la pêche de la carpe sur ce fleuve, mais à notre connaissance peu ou prou de français sont venus tenter leur chance chez leurs cousins d'Amérique. Et puis qui que ce soit étant déjà venu, au vu des cartes, des trésors cyprins inestimables sont encore à découvrir dans ces immensités fluviales. Nous avons trois semaines devant nous pour en dessiner une carte approximative qui nous permettra un jour de les trouver.

Nous vous invitons au travers de ce journal de bord … du Saint-Laurent à vivre quelques moments fabuleux de cette quête de l'impossible sur l'un des plus grands fleuve du monde.

 

 

Samedi 2/7

Berline grosse mais pas adaptée...Nous voici enfin à Montréal à bord d'une puissante berline qui ne correspond pas aux attentes des carpistes que nous sommes en matière de logistiques, le genre mini-van pourtant demandé n'était pas dans les possibilités du loueur à l'aéroport. Tant pis nous ferons avec ! Je ne sais pas ce qu'il a ce char, il sonne tout le temps dès qu'on touche quelques choses ! Malgré tout son confort et sa puissance (V6 3l) il ne trouve pas la route tout seul et c'est avec grand peine que nous prenons la route de l'ouest. En fait nous n'avons qu'une carte ontarienne et la highway 401 que nous cherchons s'appelle route 20 au Québec…Franchement pas fortiche niveau signalétique nos cousins. Deux heures après, arrivée à Cornwall, ville frontière avec les Etats-Unis, quelques courses sont nécessaire : une tente, matelas mousse, gaz de camping, appâts ! A çà y est, première galère, les autochtones nous propose du maïs doux, des minis-épis en boîte, des épis complets à faire cuire au barbecue, et même du pop-corn . Après explications, on nous indique un endroit où trouver du « maize », mais sans l'adresse nous tournons et tournons encore sur les grands axes de Cornwall sans trouver. Tans pis il est trop tard. Nous avons encore de la route à faire pour rejoindre les terrains de camping repèrés par Internet. Arrivé sur les lieux, nous découvrons le « Long Sault Parkway ». Il s'agit d'un parc de 11 km au travers duquel une route passe d'îles en îles. Vous payez à l'entrée 21 Dollars canadiens et choisissez une place parmi 3 campings répartis sur l'espace du parc. Pour cette première nuit, nous ne pourrons pas choisir un emplacement car les camps sont pleins de touristes québécois profitant de ce premier week-end de vacances. Il est 22h30 heure locale, en réalité 4h30 heure française. Le voyage depuis Lyon 6h00 du matin nous a quelque peu fatigué…

Dimanche 3/7

La nuit a été courte. La platitude du pays rend l'aube très précoce : à 4h30 il fait jour ! A la clarté vient s'ajouter le bruit émanant de milliers d'oiseaux et d'autres bestioles non identifiées. Pour finir des chiens jouent dans l'eau à quelques mètres de la tente. Impossible de dormir plus longtemps ! En fait de chiens, il s'agit de carpes qui fraient bruyamment dans les nénuphars de la lône voisin. Sans avoir à les chercher, elles viennent à nous, le séjour s'annonce bien !

Après avoir effectué un ravitaillement en nourriture à Cornwall, nous nous remettons en quête de maïs. Sur la route, nous nous arrêtons au « Canadian Carp Club », un motel connu par Internet dont le propriétaire fût certainement l'un des premiers carpistes canadiens. Avec sa femme, ils organisent des séjours pour des anglais en mal de départs chez eux. Après discussions celle-ci nous avoue d'ailleurs ne jamais avoir rencontrer un carpiste français (je dis « un », car ma compagne anglaise pure souche et fière de sa non naturalisation, serait outrée si je disais « des » !). Bref après nous être soulagé de 30 $ CA (20 Euros) pour 20 kg de maïs trempé (sans commentaires) nous débutons nos recherches entre cette ville et celle de Prescott, soit une distance de 70 Km. Un premier constat nous inquiète quelque peu : 99 % du rivage est inaccessible ! Soit des villas privatisent totalement la berge, soit d'épais bois ou marécages empêchent toute approche. Dépités, nous établissons un camp de base au « River side Cedar Park ». Nous choisissons un emplacement au bord d'une baie idyllique, et nos plus proches voisins sont à plus de 150m. Pour 23 $ CA par jour, vous avez 2 Hectares rien qu'à vous, une table de parc en bois et un accès à des douches chaudes,et pour quelques autres de plus vous pouvez acheter du bois pour faire un feu et de la glace à rafraîchir, sympa !

Lundi 4/7

9h : nous débarquons sur un poste repéré la veille dans un petit parc bordant une petite route. Les fonds y sont important avec probablement 10 à 13 m, et la pente très encombrée d'herbiers. Après avoir jeté nos deux lignes (1 canne maxi par pêcheur en Ontario) droit devant à 15 m du bord, nous amorçons 2 kg de graines jaunes.

9h20 : pas d'activité à part un ou deux tremblement de scions étranges. Le temps est excellent. Un vent d'Ouest tempère les 27°c ambiant. A domicile, rien ne saurait m'inquiéter 20 mn après avoir posés des lignes, mais à 7000 km de chez soi dans un fleuve immense, le doute s'installe très vite. Pourtant la zone sent bon le big fish avec un poste en début d'une digue de 2 km, des fonds durs et un courant frais à 20m. A près tout un fleuve est un fleuve, et il n'y aucune raison à cette heure de ne pas appliquer des règles maintes fois vérifiées sur le Rhône !

9h21 : alors que le café commence à chauffer, un départ violent se produit sur le montage posé au plus près. Le monde n'existe plus pendant les dix minutes où cette carpe commune de 12,2 kg pour 98 cm tente par tous les moyens de nous échapper. Notre première carpe canadienne est enfin au sec et n'est pas seule. En effet une sangsue d'environ 15 cm l'accompagne, magnifiquement horrible !

En début d'après-midi, quelques poissons de 10 à 12 kg ont rejoint la rive. Mais le poste jouxte une mise à l'eau qui ne cesse d'être utilisée. L'agitation s'ajoute aux herbiers qui se détachent de la pente, ce qui rend la pêche très aléatoire. Les touches sont de plus en plus espacées et plusieurs fois nous devons relever les montages recouverts d'herbes épaisses rendant inopérants nos montages. Il est temps de reprendre la prospection jusqu'à l'aval de Morrisburg. Ces 30 kms couverts, il faut se rendre à l'évidence : pour pouvoir pêcher correctement le St Laurent, il faut un bateau. Le peu d'accès public aux rives donnent sur des baies enherbées où les carpes sont hors de portée d'amorçages voir de cannes.

Nous terminons cette journée au « Chrysler Marina » park, voisin de notre camping. Il s'agit d'un magnifique petit port de plaisance au milieu d'un écrin de verdure. Le front du parc est une digue enrochée léchée par un courant assez soutenu. Un rapide sondage indique une profondeur de 3 à 4 m au pied des blocs avec un fond sablonneux parsemé de quelques touffes d'herbiers. Le tout semble testable pour demain matin.

Mardi 5/7

L'orage de cette nuit n'a pas rafraîchi l'air. Il fait très humide malgré un vent d'ouest soutenu qui balaye l'immense fleuve. Nous arrivons jusqu'au poste convoité en voiture. En Ontario, il est permis de rouler sur les pelouses très résistantes qui occupent la plupart des parcs. Le moteur n'est pas encore coupé que 2,3…4 carpes de bonne taille surgissent des eaux à 15 m du bord. Très excité, nous lançons vite les lignes avec un amorçage léger.

Pendant les deux heures qui suivent, seules les oies et les goélands animent notre attente. Aucun autre poisson ne s'est laissé apercevoir et le courant charrie des herbiers qui tirent sur les montages dont les hameçons disparaissent dans les algues du fond. Inutile d'insister ! Nous plaquons le poste qui ne devait être qu'un passage avec le seul regret d'un panorama splendide. Et puis il faut trouver du grain sec pour alimenter nos pêches à venir. Il est hors de question et de budget de retourner au motel de Long Sault. Vu le rythme et les quantités passées la veille, ce sont des dizaines de kilos qu'il va falloir acheter pour tenir trois semaines. Sur la route nous stoppons au « Carpins, bait and tackle », seul et unique magasin spécialisé carpe où l'on peut se dépanner de quelques accessoires d'importation anglaise. La proprio nous donne une adresse sur Cornwall où trouver du maïs en quantité.

Un quart d'heure plus tard nous entrons dans la caverne d'Ali Baba du pêcheur à la graine. Nous achetons 4 sacs de 40 kg pour 9 $ CA pièce, de quoi préserver notre porte-monnaie. Voiture blindée, nous retournons sur le poste de la veille pour, malgré de multiples orages, capturer 5 carpes entre 10 et 12kg. Le soir nous retournons au camp pour nous faire dévorer par les moustiques. Comptez 20 suceurs de sang enragés par personne constamment malgré le « Cinq sur cinq » zone infestée, dont nous avons recouvert le peu de partie de peaux restée à nue !!!

Mercredi 6/7

Nous prenons la route de l'Ouest pour prospecter la zone entre Prescott et le lac Ontario. Une halte de deux heures est improvisée à Cardinal, village marquant la fin de la partie rapide du St Laurent : aucun signe de carpes malgré la présence d'une baie longue de 2 km bien alimentée par les eaux vives. A 10 h nous reprenons la route magnifique qui longe le fleuve qui ne cesse de s'élargir jusqu'à Kingston. A partir de Mallory Town Landing, il devient incommensurable. C'est le secteur des Thousands Islands où 1 000 îles entachent le cours d'eau. Beaucoup sont habitées et privées. Plusieurs stars nord-américaines possèdent d'ailleurs leurs résidences seçondaires dans cette région. D'autres très sauvage sont entourées d'immenses roselières alternant avec d'énormes blocs rocheux. Encore plus qu'à l'Est et pour les même raisons (berges privées ou inaccessibles), il est inenvisageable de pêcher ici sans un bateau. Tout cela est très frustrant car il est certain que des centaines de milliers de carpes vivent dans un biotope si propice, et de quelles tailles… Arrivés à Kingston, deuxième grande ville de l'est ontarien, nous déjeunons face au gigantesque lac Ontario (400 km de long sur 50 de large). Je vous laisse imaginer les poissons monstrueux qui doivent hanter ses abîmes.

L'après-midi, le chemin du retour serpente entre forêts et lacs du centre de l'Ontario. Même sur les roches du bouclier canadien, l'eau est omniprésente. Des centaines de plans d'eau d'une taille de quelques hectares, des dizaines de grands lacs dont certains mesurent plus de trente kms de long font du centre de la province une région qui nécessiterait des semaines d'exploration. Plus au nord, après Smiths Falls, nous suivons le canal Rideau. Il s'agit en fait d'un réseau de canaux très complexe qui relie le Saint-Laurent à la deuxième grosse rivière de l'est canadien : la rivière des Outaouais (Ottawa en anglais). Ceux-ci s'apparentent plus à des bras de rivières sauvages de 10 à 200m de large où la carpe trouve un biotope favorable pour se multiplier…Là encore des dizaines de kms de rives qui mériterait une prospection ; mais ce n'est pas le but de notre voyage.

Notre trip s'achève par l'immense plaine de l'Est ontarien où champs céréaliers s'insèrent dans les grandes forêts remplies de cerfs, daims, ours bruns et aussi des loups. Ici l'homme s'adapte à la nature et non l'inverse.

Après 400 kms de route nous revoilà au Long Sault Parkway où nous allons rester quelques jours. Nous choisissons un campement devant une plage face au large et aux immenses îles. Hormis la végétation on se croirait aux Caraïbes. Après installation, nous faisons en sens inverse la route qui relie les onze îles du parc. Le soir et le matin beaucoup d'animaux agrémentent le trajet. Des milliers d'oies (bernaches du Canada), les groundhogs (chiens de prairies), lièvres et lapins, visons et ratons laveurs, écureuils et chip monks(les « Tic et Tac » des célèbres dessins animés), cerfs et daims offrent un spectacle qui vous ferait presque regretter de ne pas avoir un trajet plus long pour rejoindre votre poste de pêche ! Chaque île est relié par une digue ; seul trois ponts laissent entrer et sortir l'eau assurant le renouvellement d'un lac dans le St Laurent de plusieurs milliers d'hectares. Nous nous attardons pour contempler le coucher du soleil au dessus du pont barrant la sortie à l'est. Des milliers de carpes sautent aussi bien en dessus qu'au dessus. Jamais je n'ai vu une telle densité. C'est évident nous commencerons par ce secteur demain matin.

Jeudi 7/7

Nous tendons les lignes à 8h30 et amorçons une dizaine de kilos de maïs. Pendant une demi-heure les scions des cannes ont l'air d'avoir la maladie de Parkinson . A 9 h tout s'emballe, les deux cannes démarrent simultanément. Deux poissons de 6 kg seulement sont difficilement maîtrisés. L'heure qui suit donne six départs. Trois poissons s'engouffrent sous le pont, bridant au maximum nous les dépiquons. Les cannes sont décallées plus à l'écart de ce goulet. Pendant une heure ça se calme. Inquiet de cet arrêt, nous relevons pour voir si les montages sont pêchant car il y a quelques herbiers. Aucun problème ! Je relance une ligne, pose la canne ; alors que je règle la tension du fil, il me file entre les doigts. La tresse manque de me brûler l'index. Un carpe de 10 kg bionique est au bout ! Incroyable, il a suffit de relancer pour déclencher une touche, plutôt une attaque. Ce phénomène se répètera à chaque fois qu'une période de calme relatif se présentera. Ces carpes ont un comportement de carnassiers et détecte le choc provoqué par la chute du plomb. Après avoir eu 15 départs, nous testons l'aval du pont. Plusieurs touches s'enchaînent, et peu se concrétisent par un poisson. Le fonds est encombré et infesté de grappes de moules très dangereuses pour les lignes. Nous arrêtons à 15 h . De très grosses carpes ont été vu hors de l'eau mais à une distance considérable côté lac. A environ 500 m, il est difficile d'en donner les poids, cependant vu la distance et les masses clairement identifiables, plusieurs d'entre elles dépassaient allègrement les quinze kilos… Mise à part une dépique sur une 10/13kg, nous n'avons capturé que des 6/10 sur la digue. L'après-midi est consacrée à la recherche d'autres postes sur le parc. Beaucoup de carpes sont vues entre les innombrables îles soit hors de portée soit sur des pointes inaccessibles. Ca ne va pas être simple !

Vendredi 8/7

La recherche de postes reprend. Mac Donell Island semble être la zone la plus intéressante pour les pauvres piétons que nous sommes. Une plaque sur un rocher nous indique notre latitude exacte de 45°, comme Valence en France . Un panneau explique que nous sommes sur et devant un ancien village antérieur à la construction du barrage de Cornwall en 1958. Une carte indique même la position de l'ancien lit par rapport aux zones en eau actuelle. Face à nous, une vieille écluse du 19 ème siècle gît par 20 m de fond. Les ruines font d'ailleurs l'objet de régulières plongées. Il faut dire que la clarté de l'eau (fonds visible par 8m) doit offrir de sacrés spectacles aux amateurs. Nous, nous sommes pêcheurs, et la présence de ruines diverses englouties, de grands fonds dans un lit originel et un courant soutenu sont autant d'indices forçant l'enthousiasme. 500m en aval, nous découvrons les restes de la highway II à fleur d'eau sur laquelle nous établissons notre poste. En trois heures nous faisons 12 départs pour 7 carpes jusqu'à 12 kg (encore 98 cm…). Après ravitaillement à Cornwall, le poste est amorcé laborieusement à cause d'un vent de face, pour le lendemain matin. Le manche qui faisait office pour l'épuisette et la louche s'est brisé en deux ce matin. Il a fallu bricoler un manche d'outil de jardinage qui dépanne bien mais est un peu lourd. Cà et les combats de dingue, mon épaule droite commence déjà à souffrir.

Samedi 9/7

Il a plu une bonne partie de la nuit, et c'est toujours sous une pluie fine que nous entamons notre première vraie journée de pêche. Alors que le temps s'était mis au beau en début d'après-midi, un orage apparaît de je ne sais où à 17 h. Des trombes d'eau, un vent de plus de 100 km/h empêche toute action de pêche. Un quart d'heure plus tard et 10 degrés celcius de moins, nous entamons notre 41 ème combat de la journée. Seul 26 carpes dont deux 13 kg auront été mise au sec car des herbiers extra « strong » et infestés de moules grosses comme le pouce sont venus perturber une pêche éprouvante. 40 carpes atomiques tenus en 9 heures de pêche à deux cannes, des touches sans arrêts obligeant des relancés à chaque fois, un amorçage constant pour un total de plus de 50 kg de maïs font que vous n'avez pas cinq minutes pour souffler. Je n'ai jamais pu fumer une cigarette au bout de toute la journée, idéal pour s'arrêter !

 

 

 

Dimanche 10/7

Tel un rituel, c'est à 8h00mn00s que la première ligne touche le fond 200 m plus bas que la veille. A 8h00mn03s, une carpe de 12kg est au bout sans le moindre amorçage préalable ! Terrible, j'ai failli me faire arracher la Beast Master des mains car je venais de refermer le pick-up et le frein n'était pas desserré. Le fond et le courant sont plus importants. Du haut de la digue, nous gagnions en angle et mais perdons toujours du poisson à cause des herbiers. L'après-midi, il fait chaud. Beaucoup de québécois profitent du week-end pour se rafraîchir au bord et dans le St Laurent. Malgré les baigneurs au milieu de nos lignes et des bateaux dont les pêcheurs de dorés (sandre local) finissent même par accrocher nos lignes, nous finissons cette deuxième journée test sur 27 runs pour 20 fishs. La moyenne est plus basse que la veille et les gros poissons aperçus (15kg+) sur ce poste ne se sont pas présentés. Comme en France la chaleur ne présage rien de fabuleux pour les jours à venir.

 

Lundi 11/7

Il fait 33°c à Ottawa, record de 1943 battu d'après la radio. Fatigué par les deux jours précédents, nous pêchons un poste à 30 m de la tente en aval de la fameuse ruine d'écluses. Seulement 5 carpes sont capturées en début de matinée. Le soleil monte et la lumière doit illuminer le fond du poste qui n'est que de 7m. D'ailleurs des sauts se produisent régulièrement au dessus des 20 m d'eau hors de portée. C'est le moment de faire un break. Nous « profitons » de cette chaleur pour terminer la prospection du St Laurent ontarien en aval de Cornwall. Nous poussons jusqu'au lac St Francis (ou François pour les francophones). De nouveau des berges inaccessibles presque partout, bienvenu au royaume du boat. Seul quelques postes sont envisageables dans Cornwall même, notamment sur le parc Lamoureux où nous avons vu une commune 13/15kg à 3m du bord se promener le long de l'enrochement omniprésent sur toute la ville. Après sondage et test de deux postes, les fonds se révèle chaotique et herbeux. Seul le poste à l'entrée du port industriel vaut vraiment le détour. Comme tous les ports fluviaux, il constitue une zone de choix pour les gros poissons. Une darse de plus de 2 km est continuellement oxygéné par un courant très puissant. Les fonds sont propres et oscille entre 7 et certainement plus de 15 m. Nous ne pêcherons pas la zone. Malgré une tentation forte, il serait dommage d'avoir parcouru 7 000 km pour se poster dans un environnement industrialisé, même si l'eau est tout aussi limpide qu'ailleurs. Tans pis, une prochaine fois (PS : quelques regrets en rentrant, car le potentiel d'un tel port est énorme…) !

Mardi 12/7

Encore beaucoup de chaleur, un autre poste vers l'ancienne écluse est essayé. Des fonds difficiles ne nous empêche pas de sortir un dizaine de poissons à condition d'aller dans l'eau jusqu'au coup pour les déloger.

Trop d'efforts pour des carpes de moins de 8 kg. Nous finissons la journée sur l'ancienne route pour quelques autres pas plus grosse. Trop chaud, toujours trop chaud !

Mercredi 13/7

 

Le 13 ne porte pas plus de chance. Même si le temps est à la pluie, ce n'est pas elle qui rafraîchira l'eau qui désormais est à 24° (quand je pense qu'il fait -35° en Janvier et que le fleuve est entièrement pris par les glaces, quel contraste !). Une douzaine de carpes dans la matinée s'inscrivent au tableau, aucune ne fait plus de 10kg. La seule satisfaction de cette journée est la capture exceptionnelle d'une magnifique miroir longiligne de 8 kg qui nous fait bien plaisir. Nous comptabilisons déjà quelques 100 carpes. Le pourcentage de miroir se calcule facilement…

 

 

 

Jeudi 14/7

C'est le jour de la fête nationale française ; et c'est la troisième fête nationale que le calendrier nous offre en 2 semaines : le 1 juillet pour le Canada, le 4 pour les Etats-Unis de l'autre côté du fleuve.

Nous décidons de retourner sur Morrisburg pour pêcher correctement le « Loyalist Park » où nous avions fait nos premières armes et éventuellement découvrir d'autres postes accessibles.

A part la zone d'Iroquois où un énorme barrage sert de régulateur de niveau suivant les saisons (1 à 2m de dénivelé entre l'amont et l'aval), peu d'endroits nous inspire. Le « Loyalist Park » et la digue de plus de 2 km en aval sera donc notre terrain de jeu pour quelques jours. Les grands fonds et le courant puissant devrait nous permettre de tirer notre épingle en cette période caniculaire. Effectivement, notre « record » canadien tombe cette après-midi avec une 13.5kg. De plus nous prenons une autre miroir encore plus longue que la première (9 kg pour 90 cm). Des herbiers roulant sur le fonds ne permettent que des poses de ligne d'à peine 10 minutes. Il faut régulièrement ramener les montages à la nage tellement ils sont lourds ! En partant nous amorçons 30 kg de graines, pour voir…

Vendredi 15/7

C'est à 6h30 que nous débutons la « récolte » du grain semé la veille. 20 départs pour 20 carpes dans la matinée, c'est un 100% ! En fin de matinée, un combat qui aurait dû être perdu x fois, dure près de 20mn. Des rushs de fou, la ligne s'accroche dans les rochers, les herbiers, le poisson ne veut pas rentrer dans l'épuisette. A vu dans l'eau cristalline, j'estime le poisson à 15 kg et plus d'un mètre. Enfin je décide de rentrer dans l'eau pour m'approcher de la belle car notre manche d'épuisette ne fait plus qu'un mètre depuis sa casse ; et puis il est temps d'écourter la lutte pour tout le monde : Nicola qui commence à prendre des crampes, le poisson qui aura du mal à s'en remettre (car beaucoup vont au bout de leurs forces et ont des difficultés à repartir si les combats durent) et enfin moi qui frise la crise cardiaque à chaque instant. Enfin au sec sur l'épaisse pelouse du parc, la magnifique commune a le ventre creux et ne pèse que 13.8kg pour 98 cm… Déçu pendant quelques seçondes, je revient vite à la réalité et mesure à quel point nous avons la chance de pouvoir pêcher ici des poissons aussi splendides que combatifs. Ce n'est pas la meilleure période pour capturer un spécimen, l'année est exceptionnellement chaude et nous n'avons pas à rougir de nos résultats par rapport à ce qu'il se fait en ce moment par nos amis anglais aux dires des gérants du « Canadian Carp Club ». Le but de notre voyage était de découvrir le St Laurent et ses carpes, de trouver les zones où se tiennent les gros poissons. C'est ce que nous sommes entrain de réaliser. Les enseignements en cours d'acquisition seront très utiles pour un prochain voyage…

A 13 h le poste est impossible à pêcher. Désormais les herbiers dérivants rendent les lignes inopérantes en quelques seçondes. Nous supposons que le trafic fluvial ou plutôt maritime, car les super-tankers qui passent à moins de 200m ressemble plus à des buildings qu'à des bateaux, provoque le décrochage des herbes aquatiques qui ont colonisé le haut-fond au dessus de nous. Ainsi, ajouté à la chaleur, ces masses végétales se regroupent et errent au gré des mouvements d'eau perpétuels créé par le retour de courant dont nous bénéficions sur ce poste. Pour résumer, il faut trouver une autre solution pour pêcher les après-midi.

Nous tentons donc un poste en bout de digue 2 km en aval. Le courant et le fonds y sont beaucoup plus importants. Un sympathique canadien d'origine londonienne, carpiste de son état, nous rend visite. Il est très surpris de nous voir pêcher un tel poste. Il est vrai qu'il ne ressemble pas du tout aux postes fréquentés par les sujets de sa Majesté. Sincèrement et sans être péjoratif, tous les anglais que nous avons vu jusqu'à présent pêchent en spot à la boilie sur des postes calmes et peu profonds. D'ailleurs notre visiteur confirme qu'il opère généralement ainsi. Je ne pense pas que ce soit la meilleure solution sur le St Laurent. A chacun sa pêche ! Toujours est-il qu'après des essais difficiles, nous trouvons la solution pour aborder correctement ce nouveau poste vierge. Il faut se poster très en amont et lâcher un peu de bannière, puis amorcer évidemment bien au dessus. Nous capturons deux 9 kg en ½ heure.

Nous en restons là pour le moment mais reviendrons faire un essai correct plus tard.

Samedi 16/7

Après avoir galéré toute la matinée avec les herbiers dérivants sur le « Loyalist Park », nous retournons sur le poste en début de digue. Il fait une chaleur lourde et pénible, 32°c et on frôle les 100% d'humidité. Malgré cela 10 poissons sont capturé dont une 13+, prouvant le potentiel d'un tel poste en profondeur en été. Des orages violents éclatent nous obligeant à battre en retraite ; non sans avoir « benner » lourd sur 150 m pour le lendemain.

Dimanche 17/7

Il pleut depuis le milieu de la nuit et les rochers de la digue sont glissants comme du savon. 25 départs s'enchaînent à un rythme éreintant entre 9 et 13h avec à la clef un record de session égalé à 13.8 kg, et toujours pour 98 cm… Deux 12kg+ trouvent également l'épuisette en fin de combats dantesques en simultané. Deux torpilles en même temps dans une épuisette, ça secoue grave !

En milieu d'après-midi, on se croirait sous les tropiques, il fait 32°c et 100 % d'humidité ! Des orages éclatent à nouveau ; nous stoppons la pêche les bras en compote et lessivé au sens propre comme au figuré.

 

 

 

Lundi 18/7

Pour les derniers jours de notre trip canadien, nous décidons de retourner sur le « Long Sault » pour profiter de son cadre fabuleux et insister sur les postes déjà testés. Dès 10h, les lignes sont en place sur la digue à côté du pont face au lac entouré par les onze îles du parc. Le vent d'Ouest qui souffle depuis plusieurs jours pourrait bien être notre allié sur cette berge continuellement oxygéné. Les plus gros poissons ont été vu sur ce lac dans les premiers jours avec un vent dans le dos, pourquoi ne se rapprocheraient-ils pas avec Eole ?! Et bien simplement parce que ce vent est tellement chaud, que l'eau est comme de la soupe ; et à 17h aucune des 15 carpes capturées ne dépassent les 8 kg. Rien à faire et d'ailleurs les « mammouths » n'ont pas montré leurs écailles étincelantes.

De plus certains poissons présentent des traces de piqûres caractéristiques des postes matraqués à longueur d'année. Non merci, nous ne sommes pas venu pêcher le St Laurent pour prendre des carpes déjà piquées !

Dans l'après-midi, j'ai même vu une scène qui a achevé de me convaincre de changer de poste. Le bateau d'une des deux sociétés proposant leurs services à nos amis anglais, s'est pointé sur le poste en dessous du pont pour verser 20 kg de maïs sur 5 m2 autour du montage d'un de leurs clients déposés là comme la plupart d'entre eux. Ces pratiques (à chacun sa pêche !!!) favorisent le regroupement des poissons du secteur et malgré leur nombre hallucinant, les plus goulues sont régulièrement capturées, alors que des dizaines, que dis-je des centaines de milliers de carpes vivent au dessus du barrage de Cornawall. C'est plutôt triste.

C'est pourquoi nous achèverons notre séjour sur le poste de l'ancienne route qui d'après les dires du guide du Canadian Carp Club est très peu pratiqué (trop de fonds, trop de courant … justement ce qu'il faut, surtout en été !). Nous avons trois jours et 100 kg de maïs pour faire du beau poisson vièrge.

Mardi 19/7

Le premier amorçage paye et nous capturons 25 carpes pour 30 départs entre 9 et 14h. Un bon rapport qui s'explique par une tête de ligne de 30 m de « Dressen-X » (l'heure n'est plus aux économies !) et une technique « souple » à la prise de contact qui s'est affinée avec l'expérience des 3 semaines écoulées.

Mercredi 20/7

Si la veille le temps exécrable a permis une belle pêche ; aujourd'hui le beau temps et le vent dans le dos, n'autorisent que 11 captures de taille inférieure à hier. Une 13.5 kg sauve malgré tout la journée.

Jeudi 21/7

C'est notre dernier jour de pêche, demain avion et retour à la réalité !

Le début de matinée est fabuleux tant en nombre qu'en poids, deux 13kg s'enchaînent. Puis à 10h le vent fort qui soufflait depuis le milieu de la nuit tombe, le ciel vire au bleu parfait, c'est terminé comme jamais cela ne l'a été depuis le début de notre séjour. C'est avec beaucoup de difficulté que nous capturons notre 200éme carpe canadienne au raz des rochers enherbés de la digue à nos pieds. Pourtant des carpes sautent toujours en pleine eau dans la baie au dessus de nous. Un poste est envisageable en fond de baie à condition de s'avancer 30m dans l'eau pour positionner les montages et amorcer. Pourquoi pas, ce poste laissé de côté dès le départ pour cause de risque de coupures de bannières, pourrait se révéler prometteur et plutôt original car les combats devront s'effectuer avec de l'eau jusqu'à la taille sur l'ancienne route engloutie qui traverse de part en part cette baie. Et puis nous ne pouvons pas finir une telle aventure sur cette « petite » pêche matinale. Installation, amorçage, la demi-heure « syndicale » et c'est parti ! Des combats s'enchaînent toute l'après-midi sur de magnifiques carpes à 10kg de moyenne. Voici un poste qui aurait mérité plus d'attention avec son plateau de 6/7m dégagé de toute « herbacée violente » et son courant doux comme une brise légère, bref un poste quasi parfait. Voir dans une eau cristalline ces poissons tournés à des vitesses folles autour de soi, avec des dizaines de bernaches criant à tue-tête sans cesse, voilà un tableau qui marquera nos esprits bientôt aspirés vers la France.

Il est 19 h, l'orage gronde, il est temps de remballer le matériel pour le transport aérien.

Vendredi 22/7

Pour cette dernière journée sur le sol canadien, nous prenons la route plein nord en direction d'Ottawa, capitale administrative fédérale. Nous rejoignons la route qui suit la deuxième plus grande rivière de l'Est canadien : la rivière des Outaouais. Le fleuve s'étire sur 1800 km alternant rapides et lacs démesurés. Nous nous contenterons des 200 derniers jusqu'à la confluence avec le St Laurent. Une fois encore la plupart des rivages sont privés et son accessibilité très limitée sans l'usage d'un bateau. D'un débit plus faible que son grand frère, il est également entaché de dizaines d'îles et de roselières fantastiques. Le fond semble plutôt faible et pêcher la carpe du bord de façon traditionnelle est difficilement envisageable tant les herbiers recouvrent les fonds en bordure. Cependant tout est possible pour qui voudrait s'en donner les moyens car la « rivière » mesure quand même de 1 à 5 km de large…et est plus que probablement envahi de carpes ! Bonne chance aux futurs pionniers ! 

Pour notre part, un prochain voyage pourrait bien s'organiser l'an prochain, à une autre époque, avec un bateau pour pouvoir jouir pleinement des centaines de postes envisageables sur les 60 km que nous avons vraiment essayé d'explorer . Il y a tant à faire sur ce bief qu'il ne sert à rien de se disperser.

Des poissons énormes vivent ici, beaucoup plus gros que ce que l'on en a dit, c'est sûr et évident. Depuis 10 ans, la pression de pêche est quasi nulle, les postes pratiqués sont toujours les mêmes et leur nombre est insignifiant en rapport des possibilités. De plus, les approches utilisées, souvent avec des boilies en faible quantité, ne sont pas adaptées tant le nombre de poissons est énorme. Les plus grosses carpes prises à ce jour tournent autour des 25 kg (difficile d'avoir des infos fiables !), des records tomberont vite si certains s'en occupent correctement…

Si je devais garder un souvenir à ce sujet, ce serait le bruit incroyable provoqué par un saut à environ 500m en amont un soir que nous amorcions. Je n'avais pas les yeux dessus, et n'ai vu que le rond provoqué par cette masse en plein milieu du fleuve, c'est peut-être mieux ainsi. Ce poisson quel qu'il soit était hors norme ! Le genre de fish qui vous fait dire : « il nous faudrait des plus grosses cannes… »

Allez, on embarque. Cette fois on s'en va, mais on reviendra !

Fabien CREUX

Le fleuve Saint-Laurent

Deuxième plus grand fleuve du continent nord-américain après le Mississipi, Le cours du Saint-Laurent s'étale sur plus de 1000 km. La partie qui nous intéresse est issue des 5 grands lacs du nord-est du continent américain : les lacs Supérieur, Michigan, Huron, Erié et Ontario (les deux premiers sont d'ailleurs les plus grands du monde). Le « lake Ontario » est le dernier de la chaîne et le plus petit (400 km sur 50 et plus de 300 m de profondeur !). Il donne naissance au vrai « Saint Lawrence » qui dévale près de 500 km jusqu'à l'océan atlantique avec qui il se mélange en douceur dans un immense golf du même nom à partir de la ville de Québec. Son lit actuel varie de 2 à 10 km de large et est barré par six barrages de 2 à 30m de dénivelé. Ces barrages sont tous équipés d'écluses de grand gabarit pour laisser passer des supertankers charriant près de 35 millions de tonnes de marchandises par an qui alimentent tout le centre du continent jusqu'à Chicago. Le chemin qu'emprunte ces navires est régulièrement dragué créant ainsi : la St Lawrence seaway.

Même si les premières infrastructures ont été construites sous forme de tronçons de canaux de faible gabarit dès le 18 ème siècle, c'est en 1959 que la Seaway, née d'un accord entre le Canada et les Etats-Unis, fût inauguré. Il fait office de frontière naturelle pour ces deux pays entre Kingston et Cornwall. Plus de 1 000 îles émergent du cours d'eau sur ce tronçon ; certaines sont canadiennes, d'autres américaines, alors attention de ne pas s'aventurer sans carte.

 

Les poissons et leurs biotopes

C'est dans une eau cristalline (on peut voir le fond jusqu'à plus de 8m !) que vivent plus de 80 espèces de poissons répertoriées par couche d'eau superposées. Sur le Saint-Laurent, vous pouvez pêcher aussi bien des loches de 5 g que des esturgeons de 300 kg. Le fleuve est le paradis des pêcheurs de carnassiers et des salmonidés : 2 espèces de brochet (dont le muskie jusqu'à 30 kg !), les achigans à grande et à petite bouche, les dorés (sorte de sandre dont le nombre de prises dans le pays s'estime à 8 millions par an), les 4 espèces de crapets (variétés de perches), la perchaude (notre rayée), les truites brunes, arc-en-ciel, et de mer, 4 espèces de saumon…etc, bref il y a toujours un de ces poissons à votre portée. Il y a aussi la barbue de rivière, poisson-chat qui peut peser jusqu'à 15kg pour qui certains vouent un véritable culte (un magazine spécialisé lui est dédié !).

En ce qui concerne la carpe, elle est en haut de l'échelle et s'apparent à l'espèce dominante en nombre sur les secteurs que nous avons pêché. En effet, nous n'avons pris que des carpes, alors que le barbeau est pourtant bien présent surtout où le courant est vif. Nous n'en avons vu qu'un seul mort sur le bord. Seules de petites espèces de poissons de fond non identifiées ont été prises au raccroc accidentellement tellement il y en avait quand nous amorcions.

Les biotopes sont variés avec des fonds jusqu'à 80m en amont de certains barrages, le lit mineur par 30 m de profondeur au courant puissant et tapis de roches, des lacs et des baies de plusieurs centaines d'hectares d'environ 5/7m maxi plus ensablées qu'envasées, des digues artificielles de blocs rocheux infestées d'écrevisses grosses comme des langoustines. Cette diversité alliée à des dimensions décuplées crée une capacité de nourrissage absolument titanesque. Rien que les moules qui colonisent les herbiers sont déjà une manne pour nos cyprinidés. A plusieurs reprises nous avons embroché de véritables grappes de ces bi-valves bien plus grosses que nos zébrées françaises. Aux milliards d'insectes, de larve et d'escargots d'eau s'ajoutent des essaims d'alevins dont les carpes sont certainement très friandes au vu de l'instinct carnassier qu'elles ont développé.

Tout cela fait que la carpe s'est multipliée depuis le début du XXème siècle quand elle a été introduite pour nourrir par les colons de plus en plus nombreux à s'installer sur le nouveau continent. Même si il semble que peu de variétés de souches ait été introduites, nous avons pris des carpes de toutes les formes. Il est statistiquement impossible au vu de leur développement et de leurs longueurs (10 à 20% de plus que dans le Rhône), de la latitude (45° , comme toutes les zones prometteuses en Europe), du potentiel de nourriture et du volume d'eau que plusieurs individus ne dépassent pas les 40kg mythiques. A bon entendeur.

 

La pêche

215 carpes ont été mise au sec pour 280 contacts poissons (nous n'avons pas compté les dizaines de départs sans suite et autres touches bizarres provoquées par leur agressivité à l'égard d'un amorçage).La moyenne de poids atteint 8 kg avec 2 fishs de 13.8 kg en guise de trophée. Le temps de pêche n'a été que de 120 heures à 2 cannes (ou plutôt 1.5 canne car les moments de réfection des montages fûrent très importants). Seules deux miroirs ont été capturées et sur deux secteurs différents, soit 1% du cheptel !

8 postes ont été testés, seul deux n'ont rien donné soit à cause du temps passé (base de test d'une demi-heure après amorçage), soit à cause des herbiers. On trouve des herbiers dans 90 % des fonds entre 3 et 7m, en été en tout cas. Cette masse végétale aquatique nous a posé beaucoup de problème. Toutes les baies et lacs qui composent le bassin du fleuve en sont remplis ; et poser un montage au propre devient vite impossible en certaines zones. Cela demande de lancer loin sans possibilité d'amorcer alors que toute la réussite se base en réalité sur un amorçage entretenu tous les quarts d'heure avec du volume. Nous n'avons pratiqué que des postes le permettant avec du maïs et à l'aide d'une louche.

Du maïs, il en faut énormément : 300 kg sec de cette graine universelle auront été nécessaire pour alimenter ces trois semaines de découvertes. A cela il faut ajouter 100 kg sec de petites graines pour oiseaux qui permettait de retenir un peu plus longtemps le poisson sur le coup, enfin un petit peu. L'engouement des carpes sur les graines est tel que 5 kg jeté sans précision particulière sur une ligne n'empêche pas un départ en moins de 5mn ! Trempé 24 h à l'avance avec du sucre donne un mélange détonnant grâce à une fermentation accélérée par des températures oscillant entre 33 et 24°c de jour comme de nuit durant tout notre séjour.

Le comportement des carpes canadiennes s'apparent plus à celui des carnassiers que des cyprinidés. Lorsqu'un départ se faisait attendre plus d'une demi-heure, nous relancions les lignes avec ou sans amorçage pour déclencher une « attaque ». Très souvent le plomb touchait le fond et la touche était instantanée et très violente comme un brochet sur une ondulante ! L'impact du lest et la couleur claire du maïs y sont certainement pour quelque chose. Il est d'ailleurs fort probable qu'une pêche itinérante en bateau avec un bon échosondeur donnerait d'excellents résultats surtout sur les plus gros sujets. Beaucoup de nos plus gros poissons furent pris sur ce genre d'artifice du bord surtout quand il y avait moins d'activité. Le seul risque d'une telle technique est de se faire arracher la canne des mains car croyez moi une touche quand on vient de fermer le pick-up et que le frein n'est pas encore desserré, ça surprend. La carpe au « manié », une technique à inventer !

En attendant à poste fixe, les matinées étaient plus productives au point que certains jours, il est impossible de profiter d'un repas sans être « dérangé ». La lumière devait gêner les carpes au zénith car l'eau est vraiment limpide (fonds visible par 8m). Après 14h, l'activité se manifestait loin du bord. Les trois postes les plus productifs en nombre et poids se situaient à 40 kms d'écart mais étaient très similaire : un grand fonds dur au pied d'enrochements brassé par un fort courant. Il est difficile d'estimer jusqu'à quelle profondeur nous avons pris du poisson, mais pour illustrer combien les carpes se nourrissent très bas, il fallait jusqu'à 25 secondes fil tenu pour que le plomb se pose sur le fond d'un poste au dessus de Morrisburg…

En été il semble que les plus gros sujets se tiennent sur les plus grands fonds. Même sur un bras entre les îles de Long Sault dont la forme ressemble plus à un grand lac qu'à un fleuve, nous avons vu des 15/20kg sauté en plein milieu au dessus de ce qui semblait être le chenal. Vive le bateau…

Côté matériel, rien n'a su résister aux furies canadiennes, même les stop appâts arrivent à se couper en deux lors du combat. Nous pensions avoir pris une bonne marge en nombre et en solidité avec les accessoires de montage. Pas du tout, nous avions emmené 100 Hayabusa n°1, nous sommes revenu avec 6 pièces… 45 plombs, 3 ont retrouvé la France. 200m de Dressen-X 70/100 ème , 30 agrafes et tétines auront été nécessaire pour refaire des têtes de lignes et des montages qui dès le premier combat étaient mis à mal par des fonds rocailleux et des herbiers denses infestés de moules.

Dernier conseil, n'oubliez jamais d'enclencher vos détecteurs si vous vous éloignez des cannes (une fois par jour minimum pour des besoins naturels...!), vous pourriez bien ne pas retrouver votre canne en revenant !!!

 

Infos pratiques

Budget pour 3 semaines  : 1 800 Euros par personne

•  Comment partir ? En avion bien sûr, pour Montréal ou Ottawa (600 à 800 Euros suivant saisons).

. Vol journalier Air France depuis Paris.

. Deux vols hebdomadaires Air Transat depuis Lyon.

•  Quand partir ? De début juin à mi-octobre est la période la plus sûre pour éviter les eaux froides et un temps catastrophique. En 2005, le Canada est passé de l'hiver à l'été en 2 semaines sur la fin Mai. Même si l'année fût exceptionnelle, il n'en reste pas moins que ce pays est extrême à tout point de vue ; alors prudence concernant les débuts et fins de saison.

•  Sur place :

. 1$ CAnadien= 0.65 Euros au mois de juin 2005

. Hébergement : des dizaines de motels sur Cornwall, Long Sault, Ingleside et Morrisburg (30 à 80 $)

Camping sur Long Sault et Morrisburg (21 à 30 $)

. Restauration : Fast foods (8 à 15$ suivant appétit) ou supermarchés de tout genre.

. Equipements plein air et pêche : Canadian Tire sur Cornwall et Morrisburg.

. Permis de pêche : optez pour le « Non resident conservation» pour 38$ dans les Travel Information Center si vous ne conservez pas le poisson…

. Voiture : mieux vaut réserver depuis la France, tarif Hertz 2005 : environ 350$ la semaine tout compris pour une catégorie F (berline de bonne taille)

. Langue : avis aux francophones endurcis, au-delà de Cornwall zone uniquement anglophone !

. Documents nécessaires : un passeport en cours, une CB Visa, un permis de conduire français.

 

•  Ce qu'il faut emmener :

20 kg de bagages en soute (sans surcoût) + bagages à main (sac à dos 40 litres maxi)

. duvet et matelas §

. tente § ( si camping)

. réchaud gaz §

. Vaisselle alu §

. 2 cannes (1 maxi par personne en Ontario) + 2 moulinets + 2 piques alu + 2 détecteurs.

. Epuisette

. Trousse d'accessoires montages

. Vêtements estivales + imperméable

. Trousse et linge de toilettes

. Lotion anti-moustique type tropical

. Pharmacie 1 er soins

. Appareil photo, caméscope, portable (tri bande nécessaire) + batteries et chargeurs (attention 110 V)

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